Centre d'Etudes et de Recherches

sur les Phénomènes Inexpliqués

L'invasion de "la créature bleue"

Juin 2015, début du mois...

Une fois de plus, le dicton selon lequel "le cordonnier est toujours le plus mal chaussé" est de vigueur puisqu'une information apparemment très mystérieuse et vaguement inquiétante avait fait son apparition sur Facebook et le CERPI n'en avait été averti que de manière très indirecte et hors contexte : une créature mystérieuse, bleue, aurait été apparue dans un hypermarché de Soignies. Or, Soignies est précisément la ville belge où se trouv(ait) le siège du CERPI. C'était donc presque de la provocation !

Mais de quoi est-il question ?

Jean-Paul promenait son chien aux abords de l'hypermarché Carrefour de Soignies lorsqu'il a aperçu une forme bleue dans le magasin. Il a averti la police, laquelle st allée vérifier sur place. L'alarme du magasin n'avait pas fonctionné, il n'y avait pas d'effraction et rien n'avait été volé. Cependant "de mystérieuses" traces de pas apparaissaient sur le sol, également bleues. Pour tout méfait, la créature se serait contentée de modifier des prix sur une pancarte. Voilà donc un modus operandi qui ne laissait pas d'être inhabituel et qui laissait perplexe...

C'est aussi le moment où, au CERPI, on a commencé à dresser l'oreille en se disant que cela puait l'arnaque à des centaines de kilomètres à la ronde.

Des petits bonshommes bleus, on demande à voir. Mais le méfait en question ressemble à s'y méprendre à un coup de pub. Seulement voilà, il faut vérifier. Car dans l'article désormais en notre possession, on parle de spécialistes qui seraient (déjà) venus enquêter sur place, de policiers sur le qui-vive et ne demandant qu'à comprendre, ce qui deviendra certainement possible par l'analyse de l'ADN relevé sur les lieux et d'un enregistrement vidéo par les caméras de sécurité du grand magasin.

Est-ce que, contre toute attente, il y aurait malgré tout un semblant de vérité dans tout cet enfumage ?

Un autre point a attiré notre attention : sur les premiers documents (qui ne sont apparemment plus disponibles sur le Net) on présente le soi-disant Carrefour de Soignies. C'est d'ailleurs bien de la ville de la Mygalomorphia Sonegiensis dont il est textuellement question dans l'article. Mais nous connaissons bien le magasin et cela ne correspond pas avec la photo. Une grande barre métallique bleue n'est pas à sa place. Des bacs se trouvent dans l'allée qui mène aux caisses. Il n'y a pas cela à Soignies. Toutefois, il est possible qu'une autre image, celle d'un autre magasin Carrefour, ait été utilisée en guise d'illustration, comme cela se fait parfois dans certains journaux.

Le bureau de police est à deux pas du CERPI. Il suffit de traverser la rue. Disons même - pour faire un jeu de mots - qu'il suffit de traverser le carrefour ! Au bureau de police on dément être intervenu pour un rôdeur dans le grand magasin, qu'il soit bleu ou vert ou de toute autre couleur d'ailleurs. Il n'y a donc pas de petits bonshommes bleus chez les hommes en bleu. L'affaire semble bien mal engagée pour les amateurs de mystère.

Le CERPI a cependant voulu en avoir le cœur net. Il lui a été très facile d'obtenir la confirmation que tout ceci ne reposait finalement que sur un coup de pub, plutôt mal fait d'ailleurs, un amateurisme affligeant dans lequel on a malgré tout glissé un peu d'humour, mais quel humour ! Là aussi c'est au ras des pâquerettes !
Cela a notamment été le cas quand nous avons découvert le petit bonhomme bleu qui, dans le prospectus de l'hypermarché, court d'une promotion à l'autre, distribuant des réductions en veux-tu en voilà. Il est donc tout bleu et porte des antennes, comme un "martien".

Mais revenons à nos moutons. Nous sommes allés sur place. Nous avons pu nous rendre compte qu'il ne s'agissait effectivement pas du Carrefour de Soignies. Il y avait donc au mois une erreur quant à la photo. Les articles suivants parlent d'ailleurs de Drogenbos et de Strombeek-Bever et puis, tant qu'on y est, de toute la Belgique. Le personnel de caisse fait de son mieux pour en dire le moins possible. A l'accueil, on avoue ne pas trop savoir. On n'était pas là à ce moment. Et puis, à force d'expérience dans la technique d'enquête, on parvient à délier les langues : "évidemment que c'est un coup de pub ! Bien sûr qu'il n'y a pas de "créature bleue" ou plutôt si, mais c'est la mascotte de la campagne de pub. Mais non la police n'est pas venue..."

Et pour cause que l'alarme ne s'est pas déclenchée ! Vous avez déjà vu des voleurs, des rôdeurs, etc. qui laissaient des traces aussi évidentes, des traces qui ne mènent nulle part de surcroît, et puis qui se contentent de modifier les prix ? D'analyse d'ADN il ne sera jamais question comme il n'a jamais été question de spécialistes des phénomènes inexpliqués. Les seuls que le magasin aura vu débouler seront probablement ceux du CERPI, lesquels n'ont pas eu besoin de dire que "le phénomène sera bientôt expliqué" puisque le "phénomène" a été immédiatement expliqué. Le magasin ignore même totalement qu'il a fait l'objet d'une enquête de ce type.

Par contre, le personnel du magasin était parfaitement au courant de l'article dans Facebook.
Et nous, nous sommes parfaitement au courant de ce qu'il ne faut pas trop croire ce qui s'y trouve. Nous, nous ne sommes pas des bleus...

Ah ! Nous vous parlions d'humour. Un humour affligeant, d'ailleurs. On lit ainsi dans l'un des articles : "la couleur de la créature a lancé les spécialistes sur une piste évidente : les cultivateurs de bleuets ! " Il faut avouer qu'il vaut mieux lire ça qu'être aveugle. Mais l'article de poursuivre sur le même ton, nous citons ici :

"(...) La FBCV-BKV (Fédération Belge des Cultivateurs de Bleuets (les initiales ne sont pas respectées ! NDLR) — Belgische Korenbloem Vereniging) s’est vivement défendue. M. Cornelius Boeman, président de l’association, a affirmé que les bleuets ont des racines qui s’enfoncent dans le sol. Les racines ne sont pas des pieds. Les bleuets ne peuvent donc pas laisser de traces de pas et « ça a toujours été le cas dans toute l’histoire de l’humanité.» a-t-il ajouté.
M. Cornelius Boeman a par ailleurs déclaré que les bleuets n’ont jamais eu de bras ou de mains. « Des feuilles, des pistils, des pétales : oui. Des mains : non, jamais !» a-t-il martelé. Un bleuet ne peut donc pas être à l’origine des modifications de prix peints sur les étiquettes des produits."
Nous remercions l'intéressé de ces précisions vraiment primordiales et tellement inattendues ! (Cette fédération existe-t-elle seulement ?)
Quant à l'enregistrement vidéo, vous (ne) pourrez (plus) juger de son importance "capitale" en cliquant sur : https://www.youtube.com/watch?v=E4RHMlIsjzY (cette page n'est plus disponible !) Mais nous avons quand même trouvé une image à vous proposer pour illustrer toute la "profondeur" de la supercherie.
Il s'agissait donc d'un "mystère" de pacotille. On n'en dormira pas de la nuit !
Voici de quoi vous détendre...